Trans Costarmoricaine

dimanche 5 mai 2019

le Rendez-vous des Furieux

photo par Antoine de Manu ce jour là

Qui peut être assez furieux pour vouloir décoller en soaring d'une falaise de 60m (Vaumadec) et espérer partir en cross dans les terres ?...

 Nous sommes 7: Antoine, Flo, Phiphi, Hervé, Cyril, Gilles et moi-même, une partie du team: "crosseurs du 22". Furieux, car l'année dernière Antoine, Sylvain, Hervé et Thomas ont été les pionniers. A ma connaissance, seulement Gaston, Robert, Patou ont déjà crosser depuis Tournemine dans la décennie précédente mais rien au Vaumadec, que je sache.

Cette journée se présentait avec du vent fort et les premières communications tendent à le confirmer, mais il n'en fût rien. Je regarde depuis 7h30 les balises de St Marc et je ne regrette pas de ne pas y être allé (15/31 Km/h à 10h), même si certains ont pu voler et faire de très beaux vols.

 Antoine m'appelle à ce moment là pour me signifier qu'il va déjà décoller du "déco d'Henri". Je serai un peu en retard car je dois faire un réglage sous portique de mon nouveau cocon. 

Mes premières minutes de vol sont décevantes. On vole entre 150m et 200m mais rien de plus. Les déclenchements sont faibles. L'avantage c'est qu'à 6 pilotes on balise bien le site et tout le monde est là pour la même chose... Crosser ! Donc quand ça déclenche, ça enroule !

1/2 heure de vol et déjà les premières ascendances. Je me replace et ça vole en grappe. Même si j'ai pratiqué la grappe en bord de mer à Plouézec, c'est un plaisir de voler dans cette configuration sur ce site où l'on traverse pour le classico Roselier/Binic. Antoine à dû kiffer de voir cette grappe sur son site fétiche !  

Un premier bon vario et je décale avec Phiphi mais la bulle s’essouffle à 300m devant Pordic. Phiphi revient sur site (ça plane bien face au vent une M7 !) et je dois me résoudre à faire pareil. Par bonheur avant que je ne revienne je vois déjà mes collègues reformer une grappe, ce sera la bonne. Phiphi me revient dessus à même hauteur , viens enrouler autour de moi et me crie: "C'est bon quand ça repart direct, comme ça !" 

Photo prise par Florent, au dessus de Pordic

 Nous sommes 6 à enrouler avec plus ou moins de gaz, quel beau spectacle. Antoine, Cyril, Gilles et Flo bataillent mais sont obligé de poser devant Pordic. Seuls Phiphi, Hervé et moi-même arrivons à suivre cette bulle derrière Pordic et c'est du zérotage. Pendant que Phiphi décris des grands cercles de prospections, je m'accroche à du 0,2/0,3 m/s tandis que Hervé se bat comme un diable à 200 m/sol. Rien n'est gagné. Antoine qui vient de poser nous encourage à la radio: "Bravo et bons vols !" , alors que je n'arrive pas à franchir la barre des 500m, je contrôle ma dérive qui me porte sur Trémuson. A 500m Hervé sort du diable vau vert (et c'est peu de le dire) pour me rejoindre et continuer jusqu'à 700m. Phiphi, quand à lui, sort mieux que nous avec son gun et part prospecter derrière Trémuson. 

750m, ça devient confortable mais il ne faut pas gâcher. Or des choix s'imposent car Phiphi n'est pas dans ma dérive, Hervé est entre nous deux et je ne veux pas lâcher mon axe que je sens prometteur par les contrastes de terrains et le ciel au dessus de ma tête.  Arrivé en vue du barrage du Gouët je suis à 950m, tout va bien. Je fais un tour d'horizon et je check ma dérive. j'en profite pour me délecter de cette vue sur la baie de St Brieuc. C'EST MAGIQUE

Dans les terres

Après un dernier coup d'oeil à la baie et au déco avec une pensée pour les collègues restés au champ d'honneur, je fais dos à la mer et déjà se profile un objectif: Quintin.

Dans ce ciel de feu, je suis une ligne qui porte bien et qui forme une petite rue. C'est avec 1200m que j'aborde Quintin et je profite à nouveau du spectacle. 

Par contre depuis plus d'une 1/2 heure que je vole au dessus de 900m, le froid se fait bien présent. Mes gants d'été font peu d'effet et le froid cinglant frappe mes joues. J'en profite pour m'hydrater et il me faut pomper une eau gelée avant de pouvoir avaler une eau plus tempérée, protégée dans ma poche dorsale. 

En sortie de Quintin j'enroule de nouveau dans des ascendances franches +2 à + 3 m/s pour rester au dessus des 1100m et me dirige vers Lanfains. Cap plein Sud. Je garde ce cap qui n'est pas dans le lit du vent pour éviter de fleurter avec les TMA Iroise et aussi pour rester au soleil car à l' Ouest de ma position le ciel est bien couvert, moins accueillant. 

Plus de GPS

En approchant de Lanfains je veux consulter XCsoar sur mon smartphone mais plus d'écran. Le froid à eu raison de sa batterie car je l'avais chargé à fond ce matin. Merde ! ma trace ! Plus anecdotique quand je survole Lanfains ma radio se déclenche et j'entends un semblant de :"..rent ! ....Tinue !"  Je ne sais pas si c'est Gilles qui me voit lui passer au dessus ou si c'est ailleurs mais comme je suis tout seul dans ce froid sidéral je réponds mais dans le vide. Fin de la conversation. En fait si vous avez bien tout suivi, Gilles était avec nous au Vaumadeuc, donc... Impossible que ce soit lui

Garder mon cap

Le terrain de jeu m'est un peu inconnu et pas facile de se repérer, tout les villages Bretons se ressemble vue de là haut. J'entends un message Whatsapp qui s'affiche c'est Phiphi qui viens de poser à Plouvara. Il me reste une option: me faire guider par les potes via ma géolocalisation ! D'abord j'appelle Flo pour lui demander si dans ma dérive j'ai rapidement une TMA ou si je dois craber ? Puis je pose un message comme une bouteille à la mer. Message: "Dans l'axe Quintin/Lanfains qu'est ce que je peux avoir comme emmerde d'espace aérien ?"  C'est n'importe quoi mais sait-on jamais! 

Je n'ai pas trop le temps de taper la discute car les ascendances sont vives et je dois vite me remettre à piloter. Pour ne pas gâcher je cherche le plaf' et je monte à 1500m parfois dans du + 5m/s avec du + 3 m/s intégré sur 30sec. A ce rythme je ne perds pas de temps pour regagner mes 200/300m. Dans une phase un peu plus calme je consulte mon phone et j'ai Phiphi puis Dré qui m'ont déjà répondu Bon axe d'après Phiphi et il me reste 25 Km avant la TMA Lorient 1 selon Dré (ils parlent en connaissance de cause les loulous, je peux leur faire confiance)  

D'ici...On voit à peine l'Atlantique

Je me concentre sur mon vol et je scrute autour de moi. 

Toujours un ciel couvert à l'Ouest, des éoliennes qui tourne raisonnablement mais ENE/OSO à 60° de mon cap. Devant moi ce qui semble être le lac de Guerlédan et donc, Mûr de Bretagne et donc...la forêt de Quénécan !!! Bah c'est tout vert et tout gris au dessus. Même avec 1500m je ne devrais pas arrivé bien haut de l'autre coté. Un petit coup d'eau fraîche pour m'aérer les neurones et je choisis une option plus accueillante: passer au dessus de Mûr de Bretagne quitte à craber sévère. Je me recolle au plaf' à 1600m puis je me jette dans un ciel bleu pour raccrocher derrière le barrage.  

C'est plus calme, donc j'en profite pour regarder au loin si j'aperçois l'Atlantique. Je vois bien une bande de Bleu qui se confond dans un horizon brumeux, ça doit être le Golfe du Morbihan mais c'est encore flou. Ce que je crois être Loudéac est en fait Pontivy. Pendant ce temps là les éoliennes sont clairement à 90° de mon cap voir je remonte au vent légèrement. Quand je survole Le barrage je reprends une dérive plus dans le lit du vent et je commence à regarder où je pourrais raccrocher car le nuage où je me destine semble plutôt éteindre les ascendances. Quand j'aborde ce qui sera Cléguerec, j'ai 300m et toujours rien. Un semblant de thermique me fait espérer un sauvetage à l'entrée du village mais je pense qu'il aurait été mieux de raccrocher derrière. Je dois me résigner à poser nickel dans une longue finale malgré tout non mécontent de pouvoir me réchauffer au sol.   

Mûr de Bretagne à l'ombre et le lac de Guerlédan

57 Km de plaisir

Des crosseurs heureux ( Hervé et bibi). Merci Anne-Fred pour la récup'

Je retiens de cette journée:

- le plaisir d'enrouler en bord de mer depuis un site local

- l'extraction d'un Hervé accrocheur

- le plané de Phiphi

- le survol de Quintin

- le froid d'un 3 mai à 1600m

- le survol du lac de Guerlédan que je ne voulais pas reconnaître

- 22 Km pour Phiphi, 41 Km pour Hervé et 57 Km pour moi (pas de trace GPS) 

Et encore Merci à Anne-Fred et Hervé pour la récup' qui nous à permis de prendre un verre en terrasse à Binic même pas deux heures après mon posé dans le Morbihan